Pourquoi les fidèles ont-ils été encouragés à posséder un missel ? Il faut remonter au concile de Trente (achevé en 1563). En effet, le concile décida, pour mieux se différencier des pratiques protestantes, d'imposer rigoureusement une liturgie en latin. Or bien des fidèles ne comprenaient pas cette langue ; de plus le clergé lui tournait le dos et parfois était même invisible, derrière un jubé. Que pouvaient-ils faire pendant la messe ? Pour répondre à cette attente, des livres virent le jour : les missels, ainsi nommés à partir du latin liber missalis. Les premiers d'entre eux ne proposaient que des prières à dire durant la messe, ou bien des explications et commentaires pour permettre de mieux comprendre la cérémonie.
Diffusés en plus grand nombre au XVIIe siècle, en partie grâce aux Jansénistes de Port Royal, les missels commencent à se stabiliser sous une forme qui ressemble davantage à celle que nous connaissons aujourd'hui. Les traductions de la messe en français se généralisent au XVIIIe siècle ; parfois le texte latin n'est même plus présent, ce qui crée d'intenses polémiques. Les plus anciens missels de la bibliothèque sont de cette époque : ils sont intitulés non pas missel, mais "Bon Paroissien", ou "l'Ange Conducteur". Ce dernier type d'ouvrage fut maintes fois réédité sous des formes légèrement différentes; il contient notamment des tableaux de la passion où sont représentés des gravures sur la messe.
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Les nombreux petits éditeurs de Lorraine ont produit quantité de "Livres d'Eglise", mais, passé les années 1830, l'essentiel des missels est imprimée par de grandes maisons d'édition hors de Lorraine.
Les éditeurs de missels étaient très nombreux sur le plan national dans la seconde moitié du XIXe; mais certains noms reviennent plus souvent que d'autres. De nombreux éditeurs pourraient être mentionnés, mais bornons-nous à citer ceux qui prennent le plus de place sur nos rayonnages !
Un missel moins présent?
Les exemplaires d'aujourd'hui sont moins beaux! Le livre le plus travaillé du XIXe est devenu un livre de poche. Les missels jetables se sont développés: Prions en Eglise, Magnificat, le Missel Annuel...
La réforme liturgique a élargi le choix des textes de la Bible. Au lieu de reprendre chaque année les mêmes textes comme le faisaient les anciens missels, les textes sont proposés sur trois ans pour le dimanche (années A, B, C) et sur deux ans pour la messe quotidienne.
On l'a vu, le missel a bien changé au cours des siècles, tant au niveau du contenu que de l'iconographie... Du début du XIXe siècle aux années 1950, les évolutions sont nombreuses mais il existe des motifs récurrents, des symboles du christianisme sans cesse réutilisés et adaptés: par exemple la fenêtre gothique ou la croix...
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On peut se questionner sur la raison d'être d'un tel fonds de livres liturgiques au contenu périmé depuis le concile de Vatican II. Cependant, l'intérêt de la collection pour la recherche historique est très important. A priori, ils se ressemblent tous ; et pourtant, quand on y regarde de plus près, il est difficile de trouver deux exemplaires rigoureusement identiques, tant l'imagination des auteurs, des éditeurs et des relieurs les rend variés. Les missels n'ont jusque là été que très peu étudiés. Il manque de sérieuses enquêtes statistiques. Pourtant, un tel fonds pourrait permettre aux chercheurs de réaliser diverses études variées portant, par exemple, sur :
Le fonds initial de la Bibliothèque Diocésaine de Nancy a été constitué dans les années 1980. Il comprenait moins d'une dizaine de mètres linéaires de missels, dont certains exemplaires très intéressants; mais le système de cotation, continu, laissait à désirer.
Durant les années 1990, les dons de missels ont été nombreux, mais, faute de temps pour les trier, ils furent remisés en lieu sûr.
Depuis le début de l'année 2002, l'installation de nouveaux rayonnages a permis de reprendre en main ces missels. Mis bout à bout, les missels du fonds original et ceux que nous avons reçu depuis représentent au moins une cinquantaine de mètres linéaires, soit plus de 1500 volumes.
Notre ambition, en ce qui concerne les missels, est de conserver un exemplaire de chaque type différent. Pour une même année, nous gardons tous les exemplaires si la couleur des tranches varie, si les matériaux et les dorures de la reliure changent, s'il existe des propres de tel diocèse ou pas de propre du tout, etc... Seules les nuances de couleur de la couverture ne sont pas prises en compte; ce qui importe c'est plutôt de conserver des témoins de toutes les éditions possibles, de la plus populaire à la plus luxueuse. Les images pieuses sont généralement retirées et archivées à part, dans une salle qui leur est consacrée.
La collection des exemplaires à conserver est à présent terminée et les doubles ont pu être mis en vente ou donnés pour le plus grand bonheur des personnes qui recherchent le missel de leur enfance. Mais un grand travail reste à faire pour le catalogage du fonds.